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4 septembre 2011

"LE FLINGUEUR" (1972)


L’avantage de certains remakes calamiteux comme « LE FLINGUEUR » avec Jason Statham, c'est qu'ils donnent envie de vérifier qu’on n’avait pas enjolivé l’original dans nos souvenirs.


Bishop, le mécanicien
 
Bonne nouvelle : concernant « LE FLINGUEUR » de Michael Winner, ce n’est pas le cas du tout ! Il s’est même bonifié avec les années. Le style voyant du réalisateur, son montage ultra-cut, sont plus d’actualité que jamais. « Vivre en dehors », c'est le credo d’Arthur Bishop, un tueur à gages au service de la mafia de L.A. En dehors de la société, du système et même du Milieu. Avoir ses propres Tables de la Loi et être seul. Jusqu'à la névrose, jusqu'à la neurasthénie. Jusqu'à tomber dans les pommes au moindre stress.

Car pour être une machine à tuer, Bishop n’en est pas moins un être humain et le scénario de Lewis John Carlino laisse filtrer de petites indications sur son passé. Ainsi l’anecdote racontée par Keenan Wynn en dit long sur l’enfance malmenée du futur tueur. Et sa non-relation avec les femmes fait froid dans le dos : il paie une call-girl non pas pour des gâteries perverses, mais pour lui écrire des lettres d’amour !

D'ailleurs, le sujet du film est malgré tout une love story. Un peu déviée bien sûr, un tantinet sous-terraine, mais la rencontre entre Bishop et le jeune Steve est filmée comme un coup de foudre. La première chose qu’on voie du garçon sont… ses fesses moulées dans un jeans. Et le premier regard que Bishop pose sur lui est plus qu’ambigu. Le fait que ce soit Charles Bronson qui tienne le rôle rend les choses encore plus confuses et perturbantes. Winner utilise magnifiquement le physique particulier de l’acteur, son visage ridé de vieil Apache et son corps d’athlète, sa voix monocorde dénuée de sentiment, son sourire triste. Comme Walker dans « LE POINT DE NON-RETOUR », Bishop est un mort-vivant, un technicien qui a perdu son âme depuis longtemps et qui n’existe plus qu’à travers son art. Car tuer est bel et bien un art pour lui. Il l’exerce en orfèvre, goûtant davantage le processus que l’acte lui-même. En ce sens, le premier quart-d’heure du film est éblouissant : quinze minutes complètement muettes décrivant l’exécution d’un « contrat » par le menu. À faire réviser le jugement de ceux qui persistent à considérer que toute l’œuvre de Winner est à jeter à la poubelle. Parfaitement rythmé – excepté une poursuite à moto infernalement longue et ennuyeuse (héritage de « BULLITT ? »), dialogué à minima, d’un cynisme glaçant, « LE FLINGUEUR » reste ludique, intrigant, captivant de bout en bout. Et l’approche « existentielle » adoptée par l’auteur et accentuée par la BO exceptionnelle en font quarante ans après, un véritable classique du polar noir.

Merci donc aux copistes de nous avoir poussés à revoir ce petit chef-d’œuvre qu’on peut redécouvrir en Blu-ray dans une belle édition allemande.


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